Résumé
Un matin, Adrien, maître-chien, est appelé pour un colis suspect en gare de Strasbourg. Bloom, son chien hyper-sensible, est le premier à sentir que les larmes de Capucine, venue récupérer sa valise oubliée, cachent en réalité une bombe prête à exploser dans son coeur. Hasard ou coup de pouce du destin, Adrien retrouve Capucine quelques jours plus tard dans la salle d’attente d’un couple de psychiatres. Dès lors, il n’aura de cesse de découvrir l’histoire que porte en elle la jeune femme.Dénouant les fils de leur existence, cette rencontre pourrait bien prendre une tournure inattendue et leur permettre de faire la paix avec leur passé afin d’imaginer à nouveau l’avenir.
Le deuil, rituel universel
C’est un roman polyphonique où les destins des personnages se rattachent les uns aux autres à travers les questions et les épreuves du deuil. Après la mort, ou en l’ayant frôlé, comment peut-on se relever en tant que vivant ? En tant que survivant avec l’existence qui continue à affronter ? Agnès Ledig met en scène une histoire universelle. Faite de drames personnels, de failles, de faiblesses et des béquilles qu’on leur trouve. C’est ce qui rend les personnages si attachants, il est presque impossible de ne pas s’identifier à l’un ou à l’autre au fil du récit.
La prise en compte de plus en plus forte de la santé mentale dans notre société transparaît aussi dans ce roman. C’est une mise en lumière dédramatiser de la psychothérapie. On suit les séances d’Adrien et Capucine, on est avec eux dans le cabinet, un peu comme dans la série d’Arte En Thérapie. Même si au fil des péripéties, ces séances prennent de moins en moins de place pour les personnages. La vie reprend son cours au dehors.
Les amours chez le psy partout dans le monde
Ce roman m’a tout de suite fait penser à une série coréenne. Mad for each other est une série sortie en 2021 et disponible sur Netflix. Les créateurs et l’auteure ont pris en quelque sorte le même genre, le même point de départ et ont imaginé deux fictions opposées mais complémentaires. Dans les deux cas, on retrouve une femme et un homme, éclopés par la vie. Dans la série aussi, les personnages fréquentent le même cabinet de psy. Mais là où c’est le point de départ pour un rebond chez Agnès Ledig, c’est le début du relation chat/chien pour les personnages en Corée du Sud.
Dans les deux cas aussi, l’homme incarne une figure protectrice et une figure d’autorité. Peut-être parce que c’est une facilité du genre de la romance. On perpétue des rôles genrés stéréotypés qui ont fait leur preuve mille fois. Mais peut-être aussi parce que dans les métiers de la sécurité, les gens sont plus susceptibles de connaître des épisodes de stress post-traumatiques.
Là où Agnès Ledig insiste sur l’atonie qui peut tout recouvrir dans la vie après un drame, les scénaristes de la série ont choisi de porter à l’écran une autre émotion courante de ce type de situation. La colère, envahissante, incontrôlée, dévorante.
Pour moi, ce sont deux fictions qui fonctionnent bien lorsqu’on les met en regard l’une et l’autre. Deux façons de raconter le traumatisme, le long chemin pour refaire surface. Et bien sûr, le rôle capital dans ces guérison de l’Amour avec un grand A ! On reste dans des genres légers et le happy ending est dans le contrat de départ avec le lecteur/spectateur 😉
Un roman comme programme pour faire société
Tout au long du roman, l’auteure insiste sur la force que peuvent revêtir les aspects les plus banals de l’existence. Par là j’entends les relations avec les proches, toujours là pour aider, pour consoler ou cuisiner… La cuisine, et par extension la culture de la terre, tient une place certes discrète mais bien ancrée dans le texte. C’est aussi souvent par là que les personnages s’expriment, font passer des messages, communient dans le moment présent.
Refaire société aussi au vu des enjeux de l’urgence climatique. Ce thème est cher à l’auteure, on le perçoit vraiment à la lecture. Les deux sœurs, Capucine et Adélie, incarnent chacune à sa manière ce retour aux sources, cette volonté d’être en harmonie avec la nature.
La routine c’est ennuyeux ?
Souvent, la société nous présente en modèles à suivre des existences palpitantes, à 100 à l’heure, toujours aux quatre coins de la planète etc. Comme si une vie réussie ne pouvait trouver sa place dans un environnement plus circonscrit, proche de la maison. En filigrane, ce roman nous rappelle que rêver d’autres vies, plus exaltantes, plus vibrantes, c’est aussi un privilège. Le privilège de personnes qui le plus souvent n’ont pas eu à subir des coups de massue du destin. Les personnages ici ont eu le lot de drame, de cœur qui bat la chamade, de larmes… Et ce qu’ils vont chercher au fil de l’histoire, c’est la paix, la sérénité. Une routine qui soit capable de les réconforter, de les renforcer.
L’important reste de trouver la bonne personne pour partager ces moments, exaltants ou routiniers 😀
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