Résumé
Dans la splendide propriété de Blandings, la frénésie s’est installée : Mr Peters, qui collectionne les scarabées égyptiens, vient d’être dépouillé d’un de ses précieux spécimens. Mille livres sont offertes à qui mettra la main dessus. Très vite, les candidats se pressent au château, et c’est à qui empochera la récompense…
Les débuts de la modernité
Ce livre de P.G. Wodehouse a été publié pour la première fois en 1915. La première prouesse est donc qu’il le soit encore aujourd’hui 🙂 La deuxième prouesse vient expliquer la première, le récit n’a pratiquement pas pris une ride. Même la présence du personnel de maison n’a rien d’anachronique de nos jours dans ce même milieu aristocrate !
A chaque page, on est surpris d’y trouver autant de marques de la modernité. Des théories d’égalité des sexes, aux difficultés financières des jeunes en passant par les débuts du sport version wellness 😉
Quand on se dit le début du XXe siècle, on a l’impression que des années lumières nous en séparent, ce roman vient nous rappeler que ce n’est pas si vieux !
Pour les fans de Downton Abbey
C’est donc un récit à suspense, sans être pour autant un vrai policier. Sans doute parce que la véritable finalité de ce livre n’est pas dans la résolution de cette énigme du scarabée volé. Ce serait plutôt un prétexte pour développer une satire sociale absolument désopilante.
P.G. Wodehouse nous fait une démonstration magistrale de l’humour anglais en égratignant le milieu social des familles aristocrates.
D’ailleurs, les fans de la série Downton Abbey devraient se régaler à la lecture de cet ouvrage. On retrouve le quotidien et l’intimité de ces familles anglaises qui font encore “rêver” aujourd’hui. Le quotidien dans un grand manoir transmis de génération en génération, une armée d’employés de maison et des considérations tout entières tournées vers le mariage des rejetons.
Sauf qu’ici, c’est la peinture d’une époque mais avec tous ses travers aussi. La hiérarchie minutieuse entre les employés nous fait tourner la tête, le patriarche désespéré, comme toutes les familles anglaises nobles nous dit l’auteur, par son fils cadet. Serait-ce un point commun avec l’actuel roi ? 😀
La mise en abyme
Un autre aspect qui marque la modernité de cet ouvrage, c’est le procédé de mise en abyme. En effet, l’auteur partage directement des moments de connivence avec son lecteur. Un peu comme les apartés au théâtre, on prend du recul grâce au narrateur omniscient et on rit avec lui du processus d’écriture d’un roman.
Et la mise en abyme ne s’arrête pas là. Le personnage principal, Ashe, est lui-même écrivain. Enfin écrivain… Disons qu’il vit de sa plume comme écrivaillon sous pseudonyme pour une feuille de chou quelconque. Du moins, pas de quoi en être fier et surtout, l’explication pour comprendre qu’il saute sur la possibilité de récupérer mille livres. Au comble de l’ironie de P.G. Wodehouse, qu’écrit Ashe ? Une série d’histoires policières avec toujours le même détective pour protagoniste.
Ces clins d’œil de l’écrivain à son propre travail sont comme des poupées russes dans le récit. La preuve, s’il en fallait une supplémentaire, qu’il ne faut pas le/se prendre trop au sérieux. Il vaut mieux passer un bon moment en lisant sans trop se poser de questions !
Car sinon, le lecteur pourrait presque se vexer ! En effet, dans le roman, qui est un lecteur assidu d’enquêtes comme nous sommes nous aussi en train de le faire ? Ce n’est autre que Freddie, ce fils cadet euh… Peu reluisant… Flemmard, superficiel, il n’y a que lui qui adore rester au lit pour suivre son détective préféré. Lui et les lecteurs de Bienvenue à Blandings 😉
L’autre côté du miroir
J’aime assez ce type de satires sociales qui permettent de lever le voile de personnes qui le plus souvent émerveillent et se drapent de mystère. Ce sont les mêmes ressorts que l’on peut trouver dans le roman de Julia Deck Monument national par exemple.
Derrière les paillettes, et ici, les titres de noblesse et la perspective d’un mariage avantageux, que peut-on trouver ? Eh bien les mêmes émotions, les mêmes envies que pour le commun des mortels. Des jalousies, des bêtises, de l’orgueil mal placé… Lorsque tout cela est servi avec une plume qui vous fait exploser de rire à certains passages, la lecture est réussie !
Un vaudeville rythmé
En lisant Bienvenue à Blandings, j’ai retrouvé ce rythme particulier des vaudevilles. Je pense aux pièces de théâtre de Feydeau bien sûr, le maître du genre. Mais parfois j’ai aussi eu des flashbacks du film Pouic Pouic avec Louis de Funès. Une sorte d’énergie folle qui nous entraîne dans l’histoire, des situations loufoques et toujours des dialogues qui font mouche. Les personnages sont forcément tous un peu caricaturaux, mais c’est aussi de là que naît la bonne humeur qui nous reste tout au long du roman 🙂
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