Résumé
Au XVIIIe siècle, la marquise de Merteuil et le vicomte de Valmont entretiennent une correspondance épistolaire nourrie. Elle est veuve, il n’est pas marié et ils partagent les mêmes valeurs du libertinage. Rien ne peut davantage les amuser que de séduire sans jamais s’attacher. Deux intrigues vont se nouer. Le vicomte de Valmont va devenir l’instrument de la vengeance de la marquise et la jeune et naïve demoiselle de Volanges en sera la victime. Mais encore, la marquise va lancer un défi au vicomte qui s’ennuie avec la demoiselle. Séduire et perdre un modèle de vertu, la Présidente de Tourvel. Mais se jouer des sentiments des autres cela peut-il vraiment n’avoir aucune conséquence ?
Le contexte
Ce roman épistolaire a été publié en 1782. L’auteur et le livre ont connu un succès immédiat, mais un succès nimbé de scandale vu le thème sulfureux pour l’époque.
Le libertinage au XVIIIe siècle, qui connaît son apogée vers le milieu du siècle, s’entend différemment de son acception actuelle. En effet, les libertins sont avant tout des libres penseurs. Ils revendiquent la liberté dans tous les domaines, y compris dans la vie privée. Et cela se manifeste par la recherche de relations sexuelles hors du cadre du mariage. Un scandale pour la société française corsetée de l’époque.
Ce courant ne se superpose pas entièrement avec le courant des Lumières, mais il y a des points de passage entre ces modes de pensée. C’est ce qu’incarne l’auteur, Choderlos de Laclos. Fervent défenseur des Lumières, il est aussi à l’avant-garde sur certaines thématiques. La première d’entre elles est la condition et l’éducation des femmes.
Alors que la norme est encore de les percevoir comme le moyen de nouer des alliances entre familles par le mariage puis d’assurer une descendance, Laclos défend une autre vision.
Et cette vision, développée dans d’autres textes, s’incarne parfaitement dans le personnage de la marquise de Merteuil.
Madame de Merteuil, une femme accomplie
Je me souviens que c’est un aspect qui m’avait beaucoup marqué lorsque j’ai découvert ce roman au lycée. Car certes, la marquise est méchante et dépravée, mais avec quelle classe extraordinaire !
C’est avant tout une femme qui s’est extraite seule de sa condition sociale de départ par le biais de son mariage (seule issue bien sûr à l’époque pour les femmes). Ensuite, la marquise n’a eu de cesse de parfaire son éducation, elle a tout lu, tout analysé, etc. Elle s’est construit un réseau de relations, d’appuis dans la meilleure société des nobles. En un mot, c’est une femme qui a réussi.
Ensuite effectivement, elle met tout ce savoir et toute son intelligence au service de son vice et de ses vengeances les plus basses. Mais là encore, Laclos innove avec son personnage.
Il ne se cantonne pas à montrer le vicomte de Valmont comme libertin, il met une femme à la même hauteur que lui. Une femme à sa taille, voire une femme qui va le dépasser. C’est illustrer l’égalité des sexes d’une certaine manière.
Elle est à rebours de toutes les autres femmes du roman qui incarnent les rôles classiques des femmes : la mère, la naïve, et aussi celle qui succombe. La marquise est un électron libre.
Le mal ne pouvait pas triompher
J’essaie toujours de ne pas spoiler, mais j’avoue qu’avec un tel chef d’œuvre, adapté plusieurs au cinéma et en série aussi, difficile de ne pas connaître la fin même sans l’avoir lu 🙂 Au cas où je ne m’étendrai pas sur les tenants et aboutissants dans le détail. Mais disons seulement que le mal ne l’emporte pas.
Et au vu de la teneur du roman jusque là, c’est assez surprenant ! La marquise et le vicomte tiennent la dragée haute à tout le monde tout au long du texte avant que, brusquement, tout s’effondre pour eux.
Pour ma part, j’ai plus tendance à croire que c’est un choix “contraint” de l’auteur. En effet, vu la date de publication, un roman pareil, libertin et jugé immoral si en plus les méchants n’avaient pas été punis à la fin, Laclos aurait forcément essuyé les foudres de la censure.
Cette fin c’est aussi ce qui a permis au public de se délecter du roman sans mauvaise conscience. On est dans le vice et les manipulations, on est choqués ou amusés mais la norme reprend le dessus juste avant le point final.
Pour un lecteur contemporain, c’est peut-être là la seule faiblesse de ce roman en tous points génial.
Un classique à lire et relire
Pour moi, Les liaisons dangereuses est l’un des textes qui reste toujours aussi plaisant à lire, que ce soit la première ou la dixième fois 🙂 La forme épistolaire, désuète aujourd’hui, n’est pas pénible à suivre, tant l’écriture est précise et chaque personnage a de la profondeur. Et ce roman de toutes les passions, de l’amour à la haine, nous tient en haleine jusqu’au bout.
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