Aujourd’hui, j’ai choisi de vous partager quelques titres féministes. Que ce soit pour revoir les bases, pour en apprendre davantage, pour apporter du grain à moudre, ce sont des lectures nécessaires.
Nécessaires pour comprendre les fonctionnements systémiques de la société occidentale. Et aussi pour décaler la focale, prendre du recul, s’interroger. Du cas général au cas particulier, on a toutes et tous quelque chose à apprendre des auteurs que je vais vous présenter.
Une chambre à soi – Virginia Woolf
Evidemment, on ne réinvente pas la roue, on commence par un grand classique. Ce texte reprend les discours prononcés par l’autrice en 1928 devant des collèges pour femmes. Le livre a été publié en 1929.
C’était il y a une éternité semble-t-il. Pour autant, le propos reste tout à fait pertinent. Virginia Woolf a réfléchi aux obstacles qui se dressent sur la route du succès des femmes en littérature. Et sa conclusion est limpide. Pour pouvoir produire une œuvre de fiction, les femmes doivent d’abord s’assurer un minimum d’autonomie financière.
Mais l’argent ne fera pas tout, dans une société qui fait reposer entièrement sur les femmes l’entretien de la maison et l’éducation des enfants, une écrivaine doit aussi pouvoir posséder un espace à elle… Un endroit pour ne pas être dérangée, un endroit dédié uniquement au projet artistique. Un endroit pour se retrouver face à soi-même, loin des tracas du quotidien.
Une chambre à soi est un livre à lire au moins une fois dans sa vie !
La domination masculine – Pierre Bourdieu
Dans ce court texte, l’éminent sociologue se pose en allié de la cause féministe. Il y décortique avec précision quels sont les mécanismes à l’œuvre pour créer puis maintenir une société patriarcale.
Il démontre avec des faits en quoi la domination masculine dépasse la strate du conscient des personnes et vient en réalité s’inscrire dans quelque chose de beaucoup plus profond. Quelque chose qui infuse tout le monde et toute la société, y compris les femmes.
C’est regarder avec lui l’inégalité d’un point de vue scientifique et dépassionné.
La lecture peut sembler un peu difficile à certains moments puisque Bourdieu produit une réflexion sociologique non vulgarisée. Mais cela vaut vraiment la peine de se concentrer et de poursuivre son propos.
Dans un moment où on entend la rengaine, “ne pas mettre tous les hommes dans le même panier” etc, c’est intéressant de comprendre en quoi les racines mêmes de nos sociétés occidentales font que nous sommes toutes et tous dans le même panier. Le panier patriarcal et structurellement inégalitaire.
Le prix à payer ce que le couple hétéro coûte aux femmes – Lucille Quillet
Dans cet essai, l’écrivaine Lucille Quillet met au centre de sa réflexion l’argent dans les relations amoureuses. A première vue, cela peut sembler moche, de rapprocher amour et thunes. Car justement nous sommes conditionnés à penser que l’amour triomphe de tout, se place au-dessus de tout. Vraiment ?
L’autrice regarde d’un œil neuf les inégalités dans le couple. Et avant même la formation du couple ! Tout ce que la société attend des femmes et le coût financier non négligeable que cela représente.
Et puis dépenser de l’argent pour se “maintenir” sur le “marché à la bonne meuf” selon l’expression de Virginies Despentes, c’est de l’argent que les femmes ne peuvent pas mettre dans d’autres catégories de biens ou d’épargne.
Encore une lecture pour ouvrir des pistes de réflexions !
Pourquoi les femmes ont une meilleure vie sexuelles sous le socialisme – Kristen Ghodsee
Voilà un texte au titre parfaitement provoquant ! Car comment oser défendre que le système totalitaire soviétique ait pu faire quoi que ce soit de mieux que les gagnants capitalistes de la Guerre froide ?
C’est vrai qu’à première vue, ça intrigue. Mais la chercheuse américaine va nous démontrer son point de vue et peut-être faire vaciller les convictions de certaines et certains !
Et ce n’est pas une question d’idéalisme béat de la doctrine socialiste. Où l’égalité règne et les goulags n’existent pas. Mais l’écrivaine pointe du doigt l’un des effets disons plutôt positif ou du moins meilleur qu’à l’Ouest.
Puisque les dirigeants avaient besoin de tout le monde au travail pour soutenir l’effort de guerre, cela signifie que les femmes aussi devaient travailler. Mais pour assurer l’avenir du système, il fallait aussi mettre en avant la famille et la natalité. Et donc, l’Etat a dû s’assurer de mettre en place assez de crèches, de garderies, etc pour permettre aux femmes de travailler.
Et c’est cette idée que je trouve particulièrement intéressante dans cet essai. Un Etat qui veut des femmes au travail et tout plein de bébés, doit directement se bouger pour que les femmes n’aient pas à choisir entre les deux.
C’est une lecture particulièrement édifiante quand on entend encore ces dernières semaines les candidats républicains pour la Maison Blanche dire que leur solution pour la petite enfance c’est que les gens demandent un coup de main aux grands-parents…
Dans cette sélection , j’ai mis l’accent sur les questions économiques dans les relations femmes-hommes, parce que cela reste encore le terrain le plus inégalitaire. J’espère que certains titres vous donneront envie de les découvrir !